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mardi 24 octobre 2017

Saint Jean Paul II, pape de la prière


Jean-Paul II est « entré dans la vie » le samedi 2 avril 2005, veille du 2e dimanche de Pâques, qu’il avait institué dimanche de la Miséricorde divine. Il est mort comme il a vécu, en priant. Sa vie prend tout son sens à la lumière de la prière et de la miséricorde. Canonisé le 27 avril 2014 par le pape François, l’Église a fixé la date de sa mémoire liturgique le 22 octobre, jour de son intronisation à Rome comme pape le dimanche 22 octobre 1978.

Un grand priant
La méditation de la Bible et la contemplation du mystère de Dieu auront inspiré les vingt-six années de pontificat de Jean-Paul II. Sa capacité de recueillement étonnait et sa grande intériorité pacifiait. J’en fus témoin lors d’une audience avec lui, quelques jours après la béatification de son amie mère Teresa en octobre 2003. D’autres l’ont dit avant moi, ce Polonais était un bloc de prière. Il pouvait prier partout, seul ou entouré de milliers de personnes, avec autant de profondeur.
Dans son encyclique du Jeudi Saint 2003, L’Église vit de l’Eucharistie, il faisait cette confidence : « Comment ne pas ressentir le besoin renouvelé de demeurer longuement, en conversation spirituelle, en adoration silencieuse, en attitude d’amour, devant le Christ présent dans le Saint-Sacrement? Bien des fois, chers Frères et Sœurs, j’ai fait cette expérience et j’en ai reçu force, consolation et soutien! » (no 25)
Dans sa lettre apostolique Au début du nouveau millénaire, qui est un peu son testament, il voyait « un christianisme qui se distingue avant tout dans l’art de la prière » (no 32). Ce pape rappelait que les chemins qui conduisent à la sainteté passent par la prière et la liturgie : « Tel est le secret d’un christianisme vraiment vital, qui n’a pas de motif de craindre l’avenir, parce qu’il revient continuellement aux sources et qu’il s’y régénère » (no 32).

Les racines polonaises
C’est d’abord auprès de sa mère que le petit Karol Wojtyla, surnommé Lolek, apprend très tôt à faire sa prière. Le père prendra la relève au décès de son épouse en 1929. Son fils n’a que neuf ans. Tous les jours, il va à la messe avec lui, ils font ensemble la prière du soir, dorment dans la même pièce. La nuit, que de fois n’a-t-il pas vu son père à genoux! Ce dernier lui transmet l’amour de Dieu et de la Pologne, le culte de la montagne et des pèlerinages à Marie.
Ce père si dévoué mourra seul, en février 1941, dans une Pologne occupée par les Allemands, alors que Karol travaille dans une carrière de pierre. Le choc est terrible pour le jeune homme de vingt ans. Orphelin et déraciné dans sa patrie, il voit s’ouvrir à lui le sacerdoce. Il résiste contre l’occupation allemande en faisant du théâtre avec la troupe Rapsodie, pour la beauté des mots et l’émotion qu’apporte une parole vivante. Il écrit de la poésie, qu’il trouve proche de la prière, comme les psaumes. Les dernières années de son long pontificat seront d’ailleurs consacrées à la méditation des psaumes, lors des catéchèses publiques du mercredi.
Plus jeune, Karol aimait fréquenter la chapelle du monastère des carmes à Wadowice. Il y trouvait là un silence qui nourrissait son cœur à cœur avec le Christ. Plus tard, il fera sa thèse de doctorat en théologie sur la foi dans la pensée du carme espagnol Jean de la Croix. Lorsque, durant la guerre, il étudiait clandestinement la théologie, il avait envisagé la vie monastique. Il gardera toute sa vie l’amour du silence et de la solitude, ces deux ailes de la prière profonde.
Nommé évêque de Cracovie en 1958, il choisit sa devise, extraite d’une prière à la Vierge de saint Louis-Marie Grignion de Montfort : « Totus tuus. Tout à toi. » Il fait ainsi référence à Marie, lui consacrant sa vie. Elle sera toujours là, protégeant et soutenant ce fils qui l’aime tant. Pour marquer l’entrée de sa vingt-cinquième année de pontificat, le 16 octobre 2002, il publie une lettre apostolique Rosarium Virginis Mariae, où il montre la place centrale du Rosaire dans sa vie : « Le Rosaire m’a accompagné dans les temps de joie et dans les temps d’épreuve. Je lui ai confié de nombreuses préoccupations. En lui, j’ai toujours trouvé le réconfort. Le Rosaire est ma prière préférée. C’est une prière merveilleuse. Merveilleuse de simplicité et de profondeur » (no 2).

De la Pologne à Rome
Mgr Wojtyla participe aux sessions du concile Vatican II. Chaque jour, il arrive assez tôt à la basilique Saint-Pierre pour prier dans la chapelle du Saint-Sacrement. Il y côtoie le protestant Roger Schultz, prieur du monastère de Taizé, qui deviendra son ami. Il se rendra plusieurs fois à Taizé. L’unité des chrétiens deviendra d’ailleurs une préoccupation constante de son pontificat.
Le jeune évêque devient assez proche de Paul VI qui le nomme cardinal. Il passe plusieurs heures par jour en prière : oraison silencieuse, messe matinale, bréviaire, chapelet, chemin de Croix. Le curé d’Ars reste son modèle de prêtre, aussi aime-t-il confesser. Il fait parler de lui en 1977 lorsqu’il appuie les ouvriers polonais du mouvement Solidarité, se liant d’amitié avec Lech Walesa.
À la mort de Paul VI, il se rend à Rome pour le conclave. Jean-Paul Ier meurt un mois après son élection. Nous connaissons la suite. L’Église et le monde vont découvrir un géant de la foi. Ce premier pape venu de l’Est deviendra bien vite familier à tous. Quelques jours après son élection, il sort déjà du Vatican et se rend au sanctuaire marial de la Mentorella, près de Rome.

Le serviteur souffrant
Tout Jean-Paul II était déjà présent en Karol Wojtyla. Un exemple : même s’il est le premier pape à prier dans une synagogue à Rome le 13 avril 1986, il l’avait déjà fait en 1969 en se rendant à la synagogue de Cracovie, alors qu’il était archevêque. Même chose pour les cérémonies publiques de repentance lors du Jubilé. Karol Wojtyla avait déjà été à l’origine d’une démarche de réconciliation entre les évêques polonais et les évêques allemands en 1965. Pour lui, la prière s’enracinait dans la vie.
Ce priant aimait faire du sport. En Pologne, il organisait des randonnées en montagne et des excursions en canoë-kayak avec des jeunes. Une opération au fémur en 1994 mettra fin au ski. Il restera au « sportif de Dieu », selon l’expression du cardinal Marty, les vacances annuelles où il en profitait pour marcher dans la nature et « parler tranquillement à Dieu », comme il le disait lui-même.
La santé du pape aura été rudement mise à l’épreuve, surtout depuis son attentat sur la place Saint-Pierre, le 13 mai 1981, jour anniversaire de la première apparition de Marie à Fatima. Il confiera à son ami André Frossard : « Une main a tiré, une autre a guidé la balle. » Sa prière et son action pour construire « la civilisation de l’amour » n’en seront que plus ferventes. Il contribuera à l’effondrement du communisme en Europe et à la chute du mur de Berlin. Il voyagera plus que jamais, luttant contre ce qu’il appellera « une culture de mort ».
La maladie de Parkinson fait son œuvre dans son corps. Après plus de cent voyages à travers le monde, il ne marche quasiment plus. Son corps n’est qu’offrande, comme sa prière. Il fait entrer l’Église dans le troisième millénaire par sa souffrance. À chacune de ses apparitions, les gens sentaient bien que ce pape courbé était là pour eux, leur parlant comme un père à ses enfants. Il les aima jusqu’à la fin, même sans paroles. Il appellera souvent l’humanité angoissée à s’unir à lui dans la miséricorde de Dieu, élément clef de son pontificat.
Fait unique dans l’histoire, le pape organisa à Assise trois rencontres avec les chefs des autres religions pour prier et jeûner ensemble pour la paix dans le monde. L’image la plus forte de son pontificat restera peut-être sa visite à Jérusalem où, le 26 mars 2000, il se rendit devant le mur des lamentations et y déposa dans un creux du mur une prière par laquelle il implorait le pardon de Dieu pour toutes les fautes commises contre les Juifs, le peuple de l’Alliance.
Benoît XVI aura la grâce de béatifier son ami le 1er mai 2011. Le pape François le canonisera en même temps que Jean XXIII le 27 avril 2014 devant 800 000 fidèles. Il dira de ces deux papes : « Ils ont connu les tragédies mais n’en ont pas été écrasés. En eux, Dieu était plus fort ».

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