À partir de ce vendredi 29 septembre, les juifs
fêtent Yom Kippour, ou Jour du Grand Pardon. Partons aux origines de cette
célébration qui a permis aux chrétiens de comprendre la mort de Jésus sur la
croix.
Le Jour
(Yom) du Grand Pardon (Kippour) est considéré comme la fête la plus
sainte de l’année juive. Il consiste en 25 heures de jeûne et de prières,
scandées par cinq offices à la synagogue. Mais pour les chrétiens aussi,
ce jour — qui a lieu quelques jours après le nouvel an juif (Shana Tova) — est un jour d’une très
profonde signification, car le Nouveau testament comprend la mort et la résurrection
de Jésus comme le Kippour définitif et l’ultime « Sabbat des
sabbats ».
À son
propos, Benoît XVI, rappelait lors d’une audience générale, en 2012 que « ce jour-là, le Grand Prêtre accomplit
l’expiation d’abord pour lui-même, puis pour la classe sacerdotale et enfin
pour toute la communauté du peuple. Le but est de redonner au peuple d’Israël,
après les transgressions d’une année, la conscience de la réconciliation avec
Dieu, la conscience d’être un peuple élu, un “peuple saint” au milieu des
autres peuples. La prière de Jésus, présentée dans le chapitre 17 de l’Évangile
selon saint Jean, reprend la structure de cette fête. Jésus, cette nuit-là,
s’adresse au Père au moment où il s’offre lui-même. Lui, prêtre et victime,
prie pour lui-même, pour les apôtres et pour tous ceux qui croient en Lui, pour
l’Église de tous les temps (Jn 17, 20) », expliquait le pape
émérite.
Comprendre
le mot « kippour »
En hébreu,
le mot « kippour » est composé de quatre consonnes caf, pé,
rech et vav. Les lettres hébraïques ne sont pas seulement des
signes, mais elles portent aussi un sens. Ainsi caf signifie
la paume de la main ; pé signifie la bouche ; rech
signifie la tête et vav le crochet, mais aussi l’homme qui fait le lien
entre la Terre et Dieu.
Ainsi, par
sa composition scripturaire, le mot « kippour » donne des indications
pour ce temps de contrition qui invite chaque homme (vav) à
ré-interroger dans sa vie ses gestes (caf), ce qu’il a dit (pé)
et ce qu’il a pensé (rech). Autrefois pour les catholiques, l’acte de
contrition invitait chacun à confesser ses fautes : en pensées, par
action, et par omission. On n’est donc pas loin du sens de kippour ! Au
début de chaque eucharistie les croyants sont aussi appelés à un acte de
contrition.
Du
« bouc émissaire » au Jésus crucifié
Il faut
savoir que jusqu’au Ier siècle après Jésus Christ, la liturgie de Yom Kippour
se déroulait au temple de Jérusalem. Et celle-ci suivait les nombreuses
prescriptions du Lévitique. Au chapitre 16, il est fait mention d’un
« bouc émissaire » sur lequel poser symboliquement tous les
péchés du peuple, puis envoyer celui-ci dans un lieu solitaire pour l’expulser
de l’espace où vivent les croyants. Pour les chrétiens, cette figure
sera assumée par Dieu lui-même en la personne de Jésus crucifié.
Comme
explique Prixm, la newsletter hebdomadaire vouée à
redonner goût à la Bible, plusieurs passages du Nouveau testament montrent
effectivement que les premiers chrétiens — c’est-à-dire les premiers juifs
qui reconnurent le messie en Jésus — utilisèrent le récit et la liturgie
de Yom Kippour pour comprendre sa mort sur la croix. L’expression
« bouc émissaire » viendrait précisément des sacrifices de Yom
Kippour.
Les
« dix jours redoutables »
Mais si pour
les catholiques le texte du Lévitique peut effectivement évoquer le sacrement
de réconciliation, temps de contrition et de demande de pardon, le pardon sera
obtenu de Dieu par l’intermédiaire du prêtre, alors que dans le judaïsme, lors
du jugement annuel, Dieu ne pardonne que les fautes qui le concernent
directement comme, par exemple, s’opposer volontairement à ses commandements.
Par contre, les fautes commises à l’égard d’autrui doivent être pardonnées par
la personne qui a été offensée. Pendant les « dix jours redoutables »
– période entre Roch Hachana, le début de l’année juive, et Yom Kippour —
chacun est appelé à demander le pardon directement à celui qu’il a, ou pense,
avoir offensé et il doit l’obtenir.
Et si
l’offensé refuse de donner son pardon, l’offenseur doit insister au moins trois
fois avant d’être libéré de son obligation. Une démarche très forte qui engage
chacun directement avec toutes les personnes qu’il côtoie. Pardonnés par Dieu,
les uns et les autres se féliciteront et ce sera la fin de Kippour marqué, à la
tombée de la nuit, par une belle collation composée essentiellement de douceurs
et pâtisseries, et plus tard un grand repas.
20 ans
après la « techouvah » de l’Église de France
Enfin, cette
année, ce temps de repentir pour les juifs est d’autant plus significatif pour
les chrétiens qu’il tombe 20 ans jour pour jour, en France, après un acte de
repentance qui fera entrer leurs relations dans une nouvelle ère : « La déclaration de repentance des évêques de
France » à propos de la Shoah, lue par Mgr Olivier de
Berranger, évêque de Saint-Denis, devant le mémorial de Drancy, le 30 septembre
1997.
Un
acte qui prend le véritable sens d’une techouvah, une des grandes étapes
du processus durant ces dix jours avant la célébration du Yom Kippour, qui veut
dire « retourner vers Dieu, et repartir dans la bonne direction par des
gestes envers les autres, ou par un repentir sincère de ses erreurs envers
Dieu »
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