Fondateur et ancien directeur du Centre chrétien pour l’étude du
judaïsme (CCEJ) de l’Université catholique de Lyon, le P. Jean Massonnet reçoit
lundi 26 septembre le prix 2016 de l’Amitié judéo-chrétienne de France, à
l’Université Catholique de Lyon, où il a longtemps enseigné.
Il reprend l’avion pour Jérusalem en novembre. Simplement « pour voir
ce qu’il s’y passe », dit le P. Jean Massonnet. À 76 ans, le prêtre
manifeste ainsi régulièrement son « amour de la communauté juive, salue
Richard Wertenschlag, le grand rabbin de Lyon. On peut être une personne
très instruite mais pas sympathisante. Lui est l’un et l’autre. »
Le prêtre aurait en effet pu ne connaître du judaïsme que les textes fondateurs
qui peuplent les vitrines de sa bibliothèque, sur les pentes de la
Croix-Rousse, à Lyon. Et ce après qu’on l’ait encouragé à des études bibliques.
Né dans un village du Bugey, dans l’Ain, ordonné en 1968, il achèvera sa
formation à l’Institut biblique pontifical de Rome en 1975.
Régulièrement en Terre sainte
Pour aussitôt partir deux ans en Israël. « Cette Bible que j’étudiais
a été fabriquée par un peuple. Il fallait que j’aille voir cela de plus près »,
sourit-il aujourd’hui. Il prend quelques cours à l’Université hébraïque de
Jérusalem, et s’y lie avec la communauté dominicaine de la Maison Saint-Isaïe, «
des chrétiens insérés dans le monde juif ».
De retour en France, il met en sourdine ses travaux en devenant
enseignant au séminaire interdiocésain Saint-Irénée de Lyon, jusqu’en 1996.
Même si ses étudiants l’appellent « rabbi » ! Il retourne d’ailleurs
régulièrement en Terre sainte. Notamment en 1989, durant un an, avant de
prendre la direction du tout nouveau Centre chrétien pour l’étude du judaïsme
(CCEJ) de l’Université catholique de Lyon. Objectif, « mettre en évidence
l’importance de la tradition juive pour la pensée chrétienne ».
C’est qu’il a entre-temps forgé « une certitude », dit-il. Les
chrétiens sont dépendants de cette tradition, portée par un peuple qui la vit
aujourd’hui. » C’est là le cœur de son engagement. Universitaire, d’abord.
Cela a pris la forme d’une thèse de doctorat, aux racines du christianisme,
portant sur « la notion pharisienne de la Révélation », à l’époque du
Second Temple. S’y lit entre les lignes un encouragement à se plonger encore et
toujours dans la Bible.
« Si la Bible n’est pas interprétée, elle ne dit rien, insiste
le P. Massonnet. On raconte que Dieu a posé son sceau sur Adam, comme un roi
pose son sceau sur des pièces de monnaie, explique-t-il en prenant une
image qu’il affectionne. Mais si seules les pièces parfaitement identiques
sont valables, la grandeur de Dieu est qu’aucun homme ne se ressemble. Chacun a
une révélation divine à apporter. Chacun a dès lors le devoir de partager ce
qui ressort de lui. Et celui d’écouter l’autre ! »
Au service du dialogue
judéo-chrétien
Lui accomplit ce devoir au service du dialogue judéo-chrétien. Au sein
du comité du diocèse de Lyon pour les relations avec le judaïsme. Et avec
l’Amitié judéo-chrétienne, dont il préside l’antenne lyonnaise. Non sans mal,
quelquefois. « On bute souvent sur la question palestinienne, au risque de
la caricature, alors que la situation est éminemment complexe », soupire
celui qui a favorisé une réflexion courageuse sur le rapport des juifs à la
terre d’Israël.
Pour autant, il est confiant dans la dynamique à l’œuvre. Deux textes
publiés ces derniers mois l’ont réjoui. La « déclaration pour le Jubilé de
fraternité à venir », reconnaissant le chemin parcouru par l’Église catholique
dans ses relations avec le judaïsme, remise par le grand rabbin de France, Haïm
Korsia, au cardinal Vingt-Trois et au pasteur Clavairoly, en novembre dernier.
Et la « déclaration de rabbins orthodoxes d’Israël, d’Europe et des États-Unis
sur le christianisme », publiée en décembre cette fois, dans la même optique. «
Ce sont deux textes très significatifs, applaudit le P. Massonnet. Ils
nous donneront beaucoup de force dans nos engagements respectifs. »
Bénévent Tosseri (à Lyon)
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