On ne sait pas grand-chose des
origines et de la vie personnelle d'Élie...
On
ne sait pas grand-chose des origines et de la vie personnelle d'Élie. Il
apparaît brusquement au chapitre 17 du premier Livre des Rois : Élie, le
Tishbite, de la population de Galaad... Essayons de tracer son portrait, au fil
des divers récits bibliques qui parlent de lui.
Un
solitaire
Élie
n'était-il pas reconnaissable à son vêtement de poils et son pagne autour des
reins (2 R 1,8), le costume traditionnel des prophètes ? Choisi par le Seigneur
pour le service de sa parole, il est d'emblée mis à part et solitaire. Cela se
traduit dès le début par l'obligation de se retirer loin des lieux
habités : « Va-t-en d'ici, lui dit le Seigneur, dirige-toi vers
l'orient et cache-toi dans le ravin de Kérith » (1R 17,2-6). Dans ce ravin
Élie a pour compagnie et bienfaiteurs des corbeaux. Plus tard, la sécheresse
s'aggravant, il reçoit l'ordre d'aller en pays étranger, à Sarepta de Sidon, où
une veuve l'accueille (17,18-20).
Aux
yeux d'Achab, qu'il doit affronter au bout de trois années d'exil, il est le
porte-malheur d'Israël et un ennemi personnel (18,17). Il semble que les autres
prophètes se regroupent en des sortes de confréries, mais Élie se déclare
devant le peuple « seul prophète du Seigneur » (18,22). Sa solitude
devient extrême lorsqu'il doit fuir la colère de la reine Jézabel après avoir
fait massacrer les prophètes de Baal (19,1-5). Il a bien un serviteur, anonyme,
mais il le laisse à Béer-Shéva et s'enfonce seul dans le désert où il s'assoit
et « s'endort sous un genêt isolé ». Quand il arrive à la montagne de
Dieu après 40 jours de marche, il se plaint au Seigneur : « Les fils
d'Israël ont abandonné ton alliance... je suis resté, moi seul, et l'on cherche
à m’enlever la vie » (19,14).
Chargé
par Dieu d'oindre Élisée comme prophète à sa place, il trouve en lui un
successeur pour l'avenir (19,16.19-21); pour le présent, cependant, c'est un
serviteur plus qu'un ami. Au dernier moment, alors qu'Élie et Élisée cheminent
ensemble, celui-ci l'appelle Maître (2R 2,35). Élie semble toujours seul.
Un
personnage complexe
L'humanité
du prophète se manifeste en des traits de caractère assez contrastés, parfois
contradictoires. Quelle que soit la difficulté, il obéit au Seigneur sans
discuter. Ainsi il part dès qu'il en reçoit l'ordre, et repart, toujours plus
loin, jusqu'au désert et à l'Horeb. Il revient parler au roi qui l'a fait
chercher partout et il affronte sa colère (1R 18,1-2). Il donne l'onction au
prophète que le Seigneur a désigné. Il annonce docilement le châtiment du
Seigneur aux usurpateurs criminels, fussent-ils roi et reine (21,20), et à
Akhazias qui se fie à l'idole Baal-Zeboub (2R 1,6).
Mais
Élie discute aussi avec son Dieu. Il lui rappelle ses obligations vis-à-vis de
la pauvre veuve de Sarepta et de son fils (1 R 17,20). Il demande grâce pour
lui-même quand l'épreuve devient trop lourde (19,4). Tout à tour il prend la
fuite et brave le courroux des rois. Il est plein de délicatesse et de
prévenance pour une pauvre veuve et un orphelin, sensible à l'angoisse du
fidèle Obadyahou qui craint pour sa vie (18,9-17), compréhensif à l'égard
d'Élisée (19,20). Mais il fait égorger, sans état d'âme apparent, 450 prophètes
de Baal (18,40) et appelle le feu du ciel sur deux chefs de cinquantaine et
leurs hommes (2 R i,10-12). Au moment du sacrifice sur le Carmel, il se moque
ouvertement des adorateurs d'une idole inerte (1 R 18,27.30-36), avant de se
montrer sûr et fier de son Dieu et de s’humilier devant lui dans une prière de
supplication.
Passionné
pour son Dieu
En
fait, la vie et la personne d'Élie sont étroitement liées à son amour pour le
Seigneur. Il lui fait entièrement confiance pour sa nourriture, son repos et sa
sécurité. Et il lui est donné de boire au torrent, d'être ravitaillé par les
corbeaux du désert (17,4-6), hébergé par une veuve sans ressources en pays
étranger (17,15-16), sauvé de son découragement mortel en plein désert (19,6).
Il transmet fidèlement et sans crainte tous les messages dont le Seigneur le
charge, et celui-ci l'entoure de délicate sollicitude : « Lève-toi et
mange, car autrement le chemin serait trop long pour toi (19,7) ».
Sûr
d'être écouté du Dieu qu'il aime, Élie se fait près de lui médiateur et
intercesseur pour ses frères. Il annonce à Akhab la fin de la sécheresse et de
la famine (18,41). Il peut assurer la veuve charitable qui l'a secouru que le
nécessaire, farine et huile, ne lui manqueront plus (17,14). Il obtient même
pour elle que Dieu rende la vie à son fils. Pourtant Élie ne se prévaut pas de
sa propre puissance: Fais que l'on sache... que je suis ton serviteur et que
c'est par ta parole que j'ai fait toutes ces choses (18,36).
La
Parole de Dieu, ainsi que ses dons, passent par lui, sans plus. Son seul secret
est une foi et un attachement sans faille. Il peut dire en toute vérité: Je
suis passionné pour le Seigneur (19,14). Passionné et donc intransigeant, il
confesse: C'est toi, Seigneur, qui es Dieu (18,37). Déjà pris au feu de Dieu
pendant sa vie, et feu lui-même comme le dit le Siracide (si 48,1), il ne
pouvait qu'être enlevé dans le feu à la fin. Non sans avoir veillé à ce qu'un
autre serviteur, Élisée, continue à porter la Parole parmi les humains.
© SBEV. Madeleine Le Saux
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