«Noël
est le début d’une aventure qui n’est autre que celle de la grâce en nos vies»
«
Noël est le début d’une aventure qui n’est autre que celle de la grâce en nos
vies »: dans le cadre de la grande neuvaine de Noël, nous re-proposons
cette lecture du « Mystère de Noël » et de son actualité, à l’école
d’Edith Stein, la sainte carmélite juive – Thérèse Bénédicte de la Croix -,
assassinée à Auschwitz en 1942, par Eric de Rus, professeur agrégé de
philosophie. Ecrivain, il a publié des recueils de poésie ainsi que des essais
consacrés à la pensée d’Édith Stein et à la démarche artistique. Eric de Rus a
aussi évoqué « la crèche et la croix » chez Edith Stein dans une
émission de KTOTV.
«
Le Mystère de Noël »
En
1931, à Ludwigshafen (Allemagne), la philosophe catholique Edith Stein prononça
une conférence sur le thème du Mystère de Noël. Cette méditation nous ouvre à
la profondeur inouïe du mystère de la naissance du Sauveur et à son actualité
dans nos vies et pour le monde.
Edith
Stein nous situe immédiatement dans la contemplation de « l’Enfant qui apporte
la paix à la terre ». Mais ne nous y trompons pas : l’étoile qui luit, haute et
pure dans la nuit de Noël, nous signifie que la venue de la Lumière parmi nous
n’est pas immédiatement reçue en raison de l’épaisseur du péché. Noël c’est ce
grand mystère de l’Amour semé dans l’obscurité, et finalement victorieux ! «
C’est là une vérité difficile et grave, que l’image poétique de l’Enfant dans
la crèche ne doit pas nous masquer. »
Edith
Stein déchiffre l’éclat de l’étoile suivie par les bergers dans la nuit comme
un appel qui doit se frayer douloureusement son chemin dans nos cœurs. Car Noël
est déjà l’écrin de l’appel du Sauveur que les disciples entendront résonner :
« Suis-moi ». Et d’ajouter: « Il le dit aussi pour nous, et nous place devant
le choix entre lumière et ténèbres. »
En
d’autres termes, Noël est le début d’une aventure qui n’est autre que celle de
la grâce en nos vies. Edith Stein a appris à l’école des maîtres du Carmel,
Thérèse de Jésus et Jean de la Croix en particulier, que la grâce veut se
déployer en nous comme une semence de vie qui nous transforme en nous faisant
communier à la Vie même de Dieu. Et c’est précisément en Jésus que s’accomplit
ce mystère, Lui dont nous devenons, par le baptême, les membres vivants de son
Corps qui est l’Eglise.
C’est
pourquoi la suite de la méditation d’Edith Stein insiste sur les signes
fondamentaux d’une existence humaine unie à Dieu : l’amour de charité envers le
prochain, – « qu’il soit parent ou non, que nous le trouvions sympathique ou
non, qu’il soit ou non moralement digne de notre aide » –, et la remise de
notre volonté entre les mains du Père. Faire la volonté de Dieu c’est « mettre
nos mains dans celles de l’Enfant divin » à l’imitation de la Vierge Marie, de
saint Joseph et de tous les saints. Dans sa contemplation de l’Enfant-Dieu
Edith Stein nous entraîne sur les chemins d’une véritable configuration au
Christ et au mystère du salut. Car accueillir l’Enfant-Dieu c’est participer à
la disposition fondamentale du Cœur du Christ tout entier amoureusement remis
au Père, comme son enfant bien-aimé, dans une confiance « inébranlable ».
Par
conséquent, l’enjeu de Noël est de laisser la grâce « pénétrer de vie divine
toute une vie d’homme ». Ce qui suppose d’« être chaque jour en relation avec
Dieu » par l’écoute de sa parole, par la prière intérieure et liturgique, par
la vie sacramentelle. A l’école de l’Enfant-Dieu nous apprenons à vivre en « enfant
de Dieu » afin de « naître à l’immensité de la vie du Christ. » Tel est « le
chemin ouvert à chacun de nous, à l’humanité tout entière. »
Dans
cette conférence d’Edith Stein nous retrouvons, encore et toujours, la
pédagogue et phénoménologue qui éduque notre regard intérieur. Ici il s’agit de
déchiffrer sous l’apparente insignifiance de la crèche la grandeur d’un immense
appel : celui de prendre part au « grand œuvre du Rédempteur ».
Si
Noël est la fête de la joie c’est sans doute parce que la joie est un mouvement
qui nous tire hors de nous-mêmes. La contemplation de Jésus dans la crèche
réalise précisément cette sortie de nous-mêmes. L’émerveillement devant la
beauté cachée du Sauveur nous libère de nous-mêmes et nous ouvre au monde qui
attend que lui nous annoncions par nos vies « la Lumière éternelle qui est
Amour et Vie ».
Edith
Stein avait une amie très estimée en la personne de la poétesse et résistante
allemande Gertrud von le Fort. De bien belle manière la poétesse résume cet
appel que Noël fait tinter au cœur de chaque chrétien : « Chantez-le dans
l’attente de l’aube, chantez-le doucement, doucement à l’oreille des ténèbres
du monde ! »
Eric
de Rus
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Quelques
publications d’Eric de Rus :
«
Intériorité de la personne et éducation chez Edith Stein » (Cerf, 2006);
«
L’art d’éduquer selon Edith Stein : Anthropologie, éducation, vie spirituelle »
de Eric de Rus et Marguerite Léna (Cerf, 2008);
« La
personne humaine en question : Pour une anthropologie de l’intériorité » de
Eric De Rus (Cerf, 2011).