Hugues Landon, le grand contemplatif de La Lettre .
Nous éprouvons la peine à l’annonce du départ « dans le monde meilleur » d’Hugues LANDON.
Nous avons perdu un grand ami. Il s’est éteint dans son sommeil à l’âge de quatre-vingt- quatorze ans, le dimanche 21 juillet 2024, à la Maison de retrait des Augustines à Versailles.
Durant son séjour de cinq mois dans cette maison il a été accompagné par des amis et surtout par l’équipe de l’association Voisins&Soins. Ils disent d’avoir eu la chance de rencontrer ce grand homme, si intéressant et si attachant. Il les a édifiés par ses discussions sur les Écritures…qui les dépassaient parfois, et aussi par sa dignité face aux épreuves, notamment la mort récente de son fils cadet, Philippe.
Hugues a eu une belle vie, sa passion première c’était les chevaux, car son père le faisait monter depuis l’âge de cinq ans. Diplômé de l’École d’Alfort, il tenait le poste de vétérinaire militaire. Et il apprenait à monter à cheval ses trois fils, tout comme le faisait son père avec lui et son frère quand ils étaient enfants.
Sorti de l’armée il assurait deux places de vétérinaire en même temps : dans son cabinet de campagne et sur les champs de cours de Fontainebleau.
Toujours montant à cheval il s’est montré particulièrement doué pour le dressage, ce qui lui faisait gagner les concours complets jusqu’au devenir membre d’équipe française d’équitation dans les Jeux Olympiques au Japon.
Pourtant cette passion du cheval a constitué un paravent qui cachait une autre passion, beaucoup plus profonde : celle de devenir un jour le moine trappiste. Déjà dès l’âge de seize ans il a annoncé à ces parents qu’il allait entrer dans un couvent de contemplatifs. Mais son père s’y est opposé et lui a ordonné de faire d’abord son service militaire.
Les voies de Dieu étant impénétrables, plusieurs années plus tard, Hugues rencontre un collègue de travail au champ de cours de Fontainebleau qui est juif et qui, après avoir rencontré le Christ, reçoit le baptême et décide d’entrer au couvent des trappistes de Soligny.
Devenu le frère Jean-Pierre il a créé dans ce monastère, hors de la clôture, « un coin du judaïsme et de classe d’hébreu » ouvert à tous, pour donner le témoignage d’un Juif qui n’a pas perdu son identité juive, même en devenant le moine catholique. Et c’est dans cette » cellule du Frère Jean-Pierre », son ancien collègue de champs de courses, que la flamme de la deuxième passion d’Hugues s’est allumée. Car à l’approche de sa retraite, lors d’une de rencontres avec le frère Jean-Pierre, Hugues lui a confié sa préoccupation concernant la suite de sa vie : que vais-je faire quand je ne travaillerai plus comme vétérinaire ? La réponse de son ami ne s’est pas fait attendre : mettez-vous à l’hébreu ! Vous retrouverez la nouvelle vie !
À la suite de cette conversation Hugues, à l’âge de soixante-ans a commencé à apprendre l’hébreu, avec le manuel de base de grammaire de Horowitz, tous seul et en cours dans un groupe.
En vérité, Hugues est devenu contemplatif, tout d’abord en étudiant la langue hébreu et en venant partager la vie de prière des trappistes, quinze jours de chaque mois, pendant vingt-cinq ans. Il aidait en même temps les frères au service de l’accueil de monastère.
Arrivé en Israël en 1990 il connaissait déjà bien l’hébreu biblique. Sur place il s’est inscrit à l’oulpane pour apprendre l’hébreu moderne.
A partir de ce moment Hugues vivait sa foi et son appartenance à l’Église à travers les textes des Écritures lus et commentés en hébreu. La langue hébraïque était pour lui une langue Divine qui le faisait vivre par le moyen de l’étude quotidienne. Il était avant tout un grand contemplatif de la LETTRE HÉBRAÏQUE, source de la vie spirituelle.
Nous en avons tous reçu le rayonnement.
Ses dernières semaines de la vie étaient comme une attente de la fin. Il a reçu le sacrement des malades, ce qui était très important pour lui.
Il était en paix avec la notion de la mort et il était prêt et serein.
La dernière semaine de sa vie Jésus a accordé à son petit moine trappiste une grâce exceptionnelle : celle de passer par Sa Croix. Cloué dans son lit par la douleur atroce, sans aucune possibilité de bouger ni de changer de position par ses propres forces Hugues vivait expérience de la perte totale de ses forces et de glisser dans l’abandon ultime entre les bras du Père.
« Mon Père, mon Père, je m’abandonne à toi, fais de moi ce qu’il te plaira.. »
Hugues vivait dans sa chair la prière de son grand Maitre spirituel, Charles de Foucauld.
Le dernier soir, penchée au-dessus de son lit, je lui demandais à plusieurs reprises : « fais-moi serrer la main ». Il n’a pas eu de réaction. Seulement une respiration saccadée.
Comme il lui a été donné de vivre la Croix dans sa chair, avec le Christ, il lui sera donné pleinement de vivre la joie de la résurrection dans le Christ. Telle est le témoignage de notre foi chrétienne que notre ami Hugues nous laisse en héritage. Telle est l’Importance de la foi chrétienne face à la mort.
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