Samedi, 27 février 2021
Histoire d’ombre et de lumière, de tragédie et triomphe : Pourim est tout cela à la fois. L’allégresse qui en constitue le cœur n’est pas là par hasard et le fait que chacun la ressente avec une surprenante constance ne peut susciter l’étonnement. Car Pourim est d’abord essentiellement une fête de notre temps. Il nous parle en effet d’une époque qui ressemble à la nôtre à bien des égards : l’exil des Juifs dans un grand pays d’accueil, la situation des exilés qui, peu à peu, s’enracinent dans leur nouveau lieu de résidence, la vie comme un long fleuve tranquille jusqu’au jour où la tempête se lève... Cela évoque tant d’événements dans la mémoire de notre peuple, tant de périodes et d’horizons différents qu’on ne peut s’empêcher de trouver Pourim bien emblématique.
C’est pour cette raison qu’on ne peut vivre ce jour comme une simple commémoration. Certes, le souvenir est toujours important et il a été de nombreuses fois observé que sans passé, on ne peut guère avoir d’avenir. Mais Pourim ne peut s’arrêter là et la liesse qui en est la marque distinctive traduit cette portée différente. Et même si, cette année, elle ne peut avoir l’ampleur habituelle compte tenu des circonstances sanitaires, elle reste enracinée dans le cœur de chacun. C’est peut-être cette confiance absolue manifestée par les Juifs du temps qu’il faut retenir au présent. Ils savent qu’un ennemi implacable menace directement leur vie. Ils savent que sa haine du judaïsme ne sera satisfaite que par leur extermination. Pourtant, loin de détourner les yeux pour tenter d’oublier le danger, loin aussi de se soumettre aux diktats des puissants, ils restent eux-mêmes. Quelles que soient les circonstances, ils savent ne renoncer à rien, assumer pleinement ce qu’ils sont et c’est cette grandeur-là qui, finalement, crée les conditions de leur victoire.
N’est-ce pas aussi de nous que ce récit parle ? Les commentateurs relèvent que le livre d’Esther est la seule partie du texte biblique où le nom de D.ieu ne soit pas cité, comme pour nous permettre de voir les événements rapportés au seul prisme de la logique et de la raison. C’est dans la prise de conscience qu’il existe des ressorts cachés aux choses que tient aussi notre vie maintenue. D.ieu, a-t-on dit, n’apparaît pas dans le texte ? De fait, Il s’y dissimule, présent à chaque étape, attentif aux gestes de l’homme. En cette période de Pourim, à nous d’assumer notre part. A nous de créer les conditions qui feront la victoire finale, qui créeront le monde de bien et de sérénité, celui du bonheur de tous. Par ce que nous vivons, par ce que nous choisissons, par ce que nous sommes.
Joyeux Pourim à tous !